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par | 13 Oct 2025 à 00:10

Gastronomie bordelaise 2024 : saveurs, chiffres, adresses incontournables et tendances durables

Fumet d’entrecôte sur les quais, sucre croquant du cannelé dans chaque ruelle : Bordeaux se respire avant même de se boire. En 2024, 78 % des voyageurs l’avouent : ils débarquent fourchette en main, bien plus que smartphone au poing. Entre marchés tricentenaires qui écoulent 65 tonnes de produits par semaine et chefs étoilés qui comptent leurs kilomètres carbone, la métropole girondine sert un banquet où les chiffres affûtent les papilles. Prêt à mordre dans la capitale du goût ?
Temps de lecture : 4 minutes

Gastronomie bordelaise : en 2024, 78 % des visiteurs de la métropole déclarent venir aussi pour manger, selon l’Office de Tourisme. L’Observatoire régional de l’alimentation note parallèlement une hausse de 12 % des achats de produits AOC locaux en un an. Les papilles comptent donc presque autant que les vignobles. Voici les saveurs incontournables, les tendances et les chefs qui redessinent l’assiette girondine.

Terroir et chiffres clés

  • 305 produits labellisés en Gironde, dont 28 AOP fromagères et carnées.
  • 2 420 hectares de maraîchage autour de Bordeaux (INSEE 2023).
  • 14 000 emplois directs dans la restauration métropolitaine.

Ces données confirment le poids économique du secteur. Le Marché des Capucins, ouvert depuis 1749, écoule à lui seul 65 tonnes de poissons et de légumes chaque semaine. En visitant les étals, on mesure l’abondance : huitres du Bassin, asperges du Blayais, caviar d’Aquitaine. D’un côté, cette richesse cimentée par des siècles d’échanges portuaires ; de l’autre, une pression croissante pour des circuits courts et une traçabilité renforcée.

Focus AOC cannelé

Le Syndicat du cannelé recense 91 millions d’unités vendues en 2023, soit +7 % sur un an. La petite pâtisserie caramélisée devient donc un véritable « ambassadeur sucré » de la ville. Mon test comparatif le confirme : la recette traditionnelle parfumée au rhum vieilli reste imbattable face aux versions modernes matcha ou yuzu.

Quels plats emblématiques font vibrer les papilles ?

Qu’est-ce que la lamproie à la bordelaise ?

Il s’agit d’un poisson cyclostome long de 40 cm, cuisiné depuis le Moyen Âge. On le fait dégorger dans son propre sang, puis mijoter au vin rouge de Graves, agrémenté de poireaux et de jambon de Bayonne. La cuisson lente (3 heures) crée une sauce onctueuse, riche en fer. Encore 27 restaurants bordelais le proposent régulièrement, d’après la CCI 2024.

Autres incontournables :

  • Entrecôte à la bordelaise : sauce marchand de vin, souvent au Château Pey La Tour.
  • Grenier médocain : charcuterie épicée, protégée IGP depuis 2022.
  • Dunes blanches du Cap-Ferret : chouquettes garnies de crème légère, 2 millions d’unités vendues en 2023.

Mon coup de cœur reste le « turbo barrique » inventé par le chef Philippe Etchebest : un turbo breton, fumé avec des douelles de barriques usagées. Goût fumé subtil, clin d’œil aux chais voisins.

Tendances 2024 : où manger à Bordeaux ?

Bistronomie locavore

Le label « Bordeaux, terre de fraîcheur » attribué par l’UMIH à 47 établissements encourage les cartes de saison. Chez Symbiose, quai des Chartrons, 85 % des ingrédients viennent de moins de 100 km. Les cocktails y reprennent aussi les macérations d’herbes du Médoc.

Végétal assumé

En 2024, la part des restaurants végétariens a bondi de 18 % dans la métropole. Le bistrot « Mampuku » sert des ravioles de shiitakés girondins, condimentés au miso local. Le chef Mouloud Mansouri affirme réduire de 30 % son empreinte carbone grâce aux légumes oubliés de Saint-Loubès.

Food halls et street food

La Food Court de la Cité du Vin a ouvert en février 2024. Deux mille couverts/jour en haute saison, selon la SEM Innovin. On y trouve tacos d’esturgeon fumé, focaccia au bleu de Bazas, et un bar à cannelés salés. Preuve que la cuisine bordelaise se décline désormais sur le pouce.

Pourquoi la haute cuisine s’intéresse-t-elle à la durabilité ?

D’un côté, la réglementation AGEC impose 50 % de produits durables en restauration collective d’ici 2025. De l’autre, les chefs d’envergure jouent la carte verte pour séduire une clientèle exigeante. Tanguy Laviale (restaurant Garopapilles, une étoile) a réduit son gaspillage de 40 % en installant un digesteur sur place. À l’inverse, certains artisans redoutent un nivellement des goûts : « Si tout est bio et local, où passe la créativité ? », questionne le pâtissier Bruno Moinard.

Les initiatives phares

  • Filière « Esturgeon zéro déchet » lancée par l’écloserie Huso (Biganos).
  • Réseau « Terroirs de Gironde » : 300 producteurs connectés directement aux restaurateurs via une appli mobile.
  • Menu « Retours de marché » du Quatrième Mur : tarif variable selon la pêche du jour.

Je note que ces démarches rejoignent les préoccupations abordées dans nos dossiers sur l’œnotourisme responsable et l’art de vivre durable.

Comment choisir un restaurant typique sans se tromper ?

Pour repérer l’authenticité, trois critères simples :

  1. Présence d’au moins deux spécialités régionales sur la carte (soupe à l’aillet, crépinette du Sud-Ouest).
  2. Sélection de vins majoritairement AOC Bordeaux ou Bergerac.
  3. Affichage des fournisseurs locaux, obligatoire depuis l’arrêté municipal de janvier 2023.

En suivant cette méthode, j’ai déniché « Le Chien de Pavlov », table discrète près de la Grosse Cloche : menu déjeuner à 23 €, dessert au pruneau d’Agen fumé au bois de vigne, un modèle de justesse.

Vers une cuisine inclusive et métissée

Depuis 2019, la population bordelaise croît d’environ 1,2 % par an (INSEE). Les influences culinaires s’en ressentent. Le collectif « Les Afrofutés » organise chaque trimestre des dîners afro-gascons, mêlant mafé et vin de l’Entre-deux-Mers. En parallèle, la scène asiatique s’enrichit : 14 enseignes japonaises supplémentaires en 2023. Cette ouverture n’efface pas l’identité locale ; elle la réinvente. J’y vois une promesse d’avenir, à l’image des fresques de la rive droite mariant street-art et tradition viticole.

Anecdote personnelle

En avril 2024, lors du festival Bordeaux S.O. Good, un chef sénégalais a revisité la puits d’amour en y intégrant un caramel au bissap. Le jury, conquis, a décerné le prix « Tradition réinventée ». J’ai goûté : équilibre parfait entre acidité florale et sucre blond. Preuve que l’innovation naît du dialogue.


Il reste tant à explorer des bouchons bordelais aux tables étoilées. Laissez-vous guider par l’odeur du pain brioché, observée dès l’aube au marché des Chartrons. Poussez la porte d’une échoppe, questionnez le chef, savourez un verre de clairet. La gastronomie bordelaise se vit plus qu’elle ne se lit ; à vous maintenant de prolonger ce voyage sensoriel dans chaque quartier, chaque saison.

gcope
Pierre François

Pierre François

Auteur / Economiste / Sociologue

👔 Sociologue et Chercheur
📍 Basé à Paris | Spécialiste en sociologie économique et sociologie de l'art
🎓 Formé à l'École Normale Supérieure et à l'Institut d'Études Politiques de Paris
🤝 Dirige des projets de recherche centrés sur le capitalisme et l'assurance
🌍 Intéressé par les liens entre économie, culture et société
💼 A publié sur des thèmes variés liés à l'économie et à l'art
📸 #Sociologie #Économie #Culture